Journal de Paul-Marie Coûteaux

"Une certaine Idée de la France et du monde"

La vertigineuse addition des délires du système des partis, de l'égotisme de notre bocal politique où se sont perdus, hélas, ceux qui ont tour à tour prétendu relever le drapeau, d'une longue suite de gouvernements nuls, de l'incurie de dirigeants qui n'ont de responsables que le nom et, par-dessus tout, de l'oubli par notre peuple de tout souci de lui-même, a créé autour de nous une situation certes douloureuse mais que la France a souvent connue : le chaos. Nous voici près de ce que Bainville appelait la "récurrente anarchie française", dont nous n'apercevons encore que les premiers prodromes. Ce n'est pas une raison pour croire que la France se meure. Qui connaît l'Histoire sait qu'elle en a vu d'autres, et que l'essentiel est toujours, et en dépit de tout, de faire vivre une idée de la France, et à travers elle une idée de la diversité et de la beauté du monde. Cette idée resurgira tôt ou tard : il suffit de la garder au coeur, de distinguer ce qui meurt et ce qui vit, de voir, de comprendre, de protéger la langue, et d'écrire. Voici la suite d'un journal que je tiens depuis 1992, dont j'ai déjà fait paraître des extraits dans un ouvrage, "Un petit séjour en France", ainsi que divers blogues-notes, "For intérieur" puis "Une certaine Idée"...


vendredi 17 janvier 2014

Journal de campagne à Paris (janvier - mars 2014)


Mercredi 15 janvier 2014. – Il faut vraiment que le prétendu « phénomène NKM » ait déçu pour qu'il soit si vite admis que la partie est perdue pour elle, et gagnée par sa concurrente Hidalgo ; car quiconque mesure les handicaps des équipes écolo-socialistes a peine à croire qu'elles puissent l'emporter si aisément ; il y a d'une part la très mauvaise gestion qu'elles infligent à la Ville depuis treize années, gestion que je trouve plus critiquable à mesure que j'en découvre les détails et qui suffirait à compromettre l'idée d'un nouveau mandat de six ans ; il y a d'autre part l'actuelle décrépitude du Gouvernement écolo-socialiste, et d'un Président de la République dont la légitimité et les marges de manœuvre diminuent à mesure qu'il déçoit, et qui ne peut donc que décevoir de plus belle, cercle vicieux de l'impopularité et de l'impuissance qu'aggravent ces temps-ci les rebondissements de sa très boulevardière vie privée, et une disqualification morale aussi dangereuse que les échecs plus strictement politiques ou économiques – dont le bonhomme est certes accablé par ailleurs. Bref, alors que, pour les socialistes de Paris, le tableau devrait être sombre, la faiblesse de l'UMP les affranchit de toute sanction, et leur permet presque de parader.

         Il n'y a pas de quoi ; si le mot boulevardier m'est venu à l'esprit à l'instant, c'est que ces petits sires de gôche s'enfoncent dans une atmosphère de frivolité vaudevillesque dont la Mairie de Paris a donné maints exemples au cours des dernières années et qui semble s'étendre à toute la troupe socialiste, jusqu'à emporter celui qui fut si longtemps, et finalement demeure, le chef de leur parti : écoutant des extraits de la conférence de presse que M. Hollande donnait hier après-midi en son Palais de l'Elysée, qui du coup fait de nouveau penser à la bonbonnière de la Pompadour, je songeais que, quoi qu'il dise désormais, sa parole sera de plus en plus recouverte par l'aspect comique qu'a pris son personnage, qu'on dirait sorti du théâtre de Georges Feydeau, un de ces bons bourgeois IIIe République à gilet rayé, montre à gousset et rondeurs idoines, aux prises avec de multiples femmes entre lesquelles il ne parvient pas à mettre un peu d'ordre, et qui reste désemparé au milieu de la scène, entre les portes qui claquent de tous côtés. Dame Hidalgo, qui de longue date connaît elle aussi le bon M. Hollande, est une des actrices de cette scène, et certes elle a bien raison de se tenir à l'écart, laissant les concubines (dont l'une est bel et bien actrice, complétant le tableau de boulevard), se chamailler, tourner de l'œil ou demander leurs sels... Mais j'ai peine à croire que les Français supportent d'être longtemps gouvernés, si du moins ils croient qu'ils le sont encore, depuis de telles volières, où ne semblent plus avoir grand place l'austère souci du Bien public, le courage de former et d'arrêter les décisions, la connaissance des dossiers, des difficultés et souvent des drames innombrables dont dépend ce que font ou ne font pas les élus : on s'amuse, on marivaude, on  emprunte en sifflotant et l'on dépense à  gogo ; j'ai peine à croire que la frivolité, qui fut le trait des dernières années mais dont le temps est bien révolu, assure désormais de si faciles réélections, et tient qu'une bonne campagne, si la ou les droites acceptaient de la mener sérieusement (et ensemble…), pourrait enfin dissiper cette atmosphère d'opérette, si ridicule et grinçante quand tout s'effondre alentours. 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire