Journal de Paul-Marie Coûteaux

"Une certaine Idée de la France et du monde"

La vertigineuse addition des délires du système des partis, de l'égotisme de notre bocal politique où se sont perdus, hélas, ceux qui ont tour à tour prétendu relever le drapeau, d'une longue suite de gouvernements nuls, de l'incurie de dirigeants qui n'ont de responsables que le nom et, par-dessus tout, de l'oubli par notre peuple de tout souci de lui-même, a créé autour de nous une situation certes douloureuse mais que la France a souvent connue : le chaos. Nous voici près de ce que Bainville appelait la "récurrente anarchie française", dont nous n'apercevons encore que les premiers prodromes. Ce n'est pas une raison pour croire que la France se meure. Qui connaît l'Histoire sait qu'elle en a vu d'autres, et que l'essentiel est toujours, et en dépit de tout, de faire vivre une idée de la France, et à travers elle une idée de la diversité et de la beauté du monde. Cette idée resurgira tôt ou tard : il suffit de la garder au coeur, de distinguer ce qui meurt et ce qui vit, de voir, de comprendre, de protéger la langue, et d'écrire. Voici la suite d'un journal que je tiens depuis 1992, dont j'ai déjà fait paraître des extraits dans un ouvrage, "Un petit séjour en France", ainsi que divers blogues-notes, "For intérieur" puis "Une certaine Idée"...


mercredi 15 janvier 2014

Journal de campagne à Paris (janvier - mars 2014)

Samedi 11 janvier 2014. -- Empêcher de dormir, la vie courante à Paris pourrait bien l'infliger à quiconque garde encore le souci tant soit peu exigeant du Bien Public – ose-t-on utiliser ce mot ? Voici une autre histoire qu'il m'est arrivée tout à l'heure, rue Bonaparte. Deux dames, au timbre fort sonore et dépourvues de toute façon, m'apostrophent sur le trottoir et me demandent "Where is the Post Office?" (je traduis à l'usage des gens normaux qui n'aiment pas nécessairement le mélange des langues : « Où est la Poste ? »). Etais-je mal luné, ou la rugosité de l'abord m'avait-elle prévenu contre ces deux dames originaires d'outre-Atlantique, mais peu au fait des bons usages – qu'on y pratique pourtant couramment chez elles ? Je répondis en français : « Bonjour Mesdames, prenez à droite et tout droit », réponse que j'accompagnais de gestes à toutes fins pédagogiques. Fureur des dames, qui me tournèrent le dos tout de go, l'une proférant une sorte de mugissement où je perçus le mot french prononcé d'un ton peu flatteur – il avait toutes les allures de l'insulte...
      En serions-nous donc là ? Le colonisé doit parler la langue du maître, et s'il s'y dérobe, il est considéré comme un affreux provocateur... Il est vrai que, si la Municipalité se souciait davantage de donner à Paris une allure française, les touristes sauraient mieux à quoi s'en tenir et s'aviseraient peut-être d'apprendre quelques rudiments d'une langue qui est elle aussi,  après tout? internationale – apprendraient-ils ne serait-ce que le simple "do you speack english?", ce serait de bien meilleur augure et m'aurait incité à répondre... (Quand j'habitais à New-York, je demandais souvent à ceux que j'interpellais : « Parlez-vous français ? », passant aussitôt à l'anglais si l'on me répondait non ; et quand on me répondait oui, ce qui arrivait plus fréquemment qu'on ne l'imagine en France, il s'ensuivait un échange, et quelquefois un brin de conversation qui était des plus charmants.
    Mais comment faire en sorte que les Français se respectent, respectent leur pays, leur langue, leur ville ? Ce n'est peut-être pas un sujet de campagne municipale. Et pourtant...

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