Mardi 11 février 2014. – Entendu tout à
l'heure dans le métro une femme aux traits tirés, d'un âge incertain, et
curieusement indéterminable, dire à une autre femme qui affichait une tout
aussi mauvaise mine : « Le dimanche, je passe mon après-midi à dormir »
; et l'autre, aussitôt : « Moi aussi ! Le plus fatigant, c'est les
transports ! Deux heures et demi... ». Que de choses, dans cette
confession blafarde ! D'abord, que les Français sont de plus en plus fatigués –
cette fatigue se lit sur les visages, il s'y aperçoit souvent la marque des
médicaments, sédatifs et somnifères dont nous sommes, à ce que l'on dit, les
plus grands consommateurs de la planète. Ensuite, la vie d'une bonne part des
franciliens est grignotée par les transports, qu'il s'agisse des métros et RER
ou des automobiles et leurs embouteillages. En certaines heures, la densité
dans les couloirs, quais et wagons est insupportable – et dangereuse. L'autre
jour, il m'a fallu attendre que passent deux métros avant de conquérir de haute
lutte une place dans une boîte de sardines… Enfin, que soixante années de
conquêtes sociales n'y changent rien, le vieux « métro-boulot-dodo »
poursuit ses ravages.
La vérité est que la surpopulation de
Paris et de la région parisienne est hors de contrôle (il y a plus d’habitants
en Ile-de-France que dans toute la Belgique, la densité de Paris intra-muros
est de 25 000 habitants au km2, soit la plus élevée des capitales d'Europe), et
que la fort utile politique d'aménagement du territoire, lancée au début de la
Ve République a été complètement abandonnée en rase campagne, c'est le cas de
le dire. Oubli de toute identité, une fois encore : celle de Paris, et celle de
la France.
D'abord, il y a une identité de Paris,
ville politique, administrative, artistique, littéraire, patrimoniale et
touristique, qui n'a pas nécessairement vocation à être une métropole
économique, de surcroît la principale en France – ce que pourraient être aussi
bien Lyon, Lille ou Marseille, Nancy ou Metz, Bordeaux ou Toulouse, Tours et
Nantes, Rennes et Rouen...
De même, il y a une identité de la France,
pays rural dont le territoire est de loin le plus étendu d'Europe, et dont la
merveilleuse diaprure des campagnes, des contrées et des paysages est depuis
des lunes l'une des plus sûres richesse – richesse que le TGV, internet et
l'explosion des moyens de communication permettraient de réveiller, moyennant
une simple politique d'équilibre, et de ruralité - ce que voulait être le
défunt Aménagement du Territoire, dont plus personne ne se soucie.
Au lieu de quoi, la démagogie s'emparant
de tout, les programmes municipaux invoquent régulièrement la nécessité de
maintenir ou, pire, d'attirer les habitants dans une région surpeuplée, par
exemple par la construction de logements sociaux, supplémentaires – jusqu'au
plus pur absurde : 63 % des habitants de Paris (qui ne sont pas toujours des
Parisiens...) sont éligibles au logement social ! La raison voudrait que l'on
décourage les provinciaux (sans parler des étrangers qui, fortunées ou
misérables, sont bien trop nombreux), s'installer à Paris – et que l'on
décourage même un bon nombre des franciliens de rester en Ile-de -France.
La France est vaste...
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