Depuis le congrès pantalonesque du SIEL, samedi dernier, qui devait de
toutes façons mettre fin à mon mandat triennal de président, en somme depuis
que je me trouve enfin rendu à ma liberté et que je respire (qui a dit :
« loin des imbéciles, l'air est pur » ?), je n'ai pas de plus grand
appétit que celui d'écrire – écrire mes livres inachevés, pour commencer, mais
aussi une longue lettre ouverte à Marine Le Pen, sous la forme d'un ouvrage qui
devrait paraître au Printemps, et dans l'immédiat une lettre plus courte à elle
expédiée dès ce jour, que je vais envoyer ce soir aux membres du SIEL,
accompagnée d'un mot pour leur dire au revoir . Aussi, écrire plus sérieusement
et régulièrement ce Journal, dit aussi « bloc-notes », tant négligé
ces derniers temps. Voilà bien, pour commencer, la matière de l'entrée
d'aujourd'hui, en manière de poupées russes...
Chers amis, le spectacle qu’a offert notre congrès,
samedi dernier, était fort affligeant, comme je ne le prévoyais que trop. La
règle que j’avais posée à la fin du mois de septembre en convoquant notre
congrès, règle de bon sens qui voulait que soit arrêté le collège électoral la
veille du scrutin pour établir la liste des électeurs, à été foulée aux pieds
par l’arrivée massive, au dernier moment, d’un grand nombre de personnes
inconnues qui exigèrent de prendre leur carte. Je n’ai pas cru devoir m’y
opposer autrement qu’en protestant, de crainte que l’agressivité ne s'accroisse
et que l’image du SIEL ne soit d’avantage encore ternie. Je me suis borné à
dénoncer ce coup de force, puis à quitter les lieux en demandant à la police de
les protéger – me trouvant, en tant que président du SIEL, responsable de la
sécurité de tous. Je n’ai donc pas pu vous dire au revoir ; mais cet au revoir
signifiant justement que je gardais l’espoir que nous nous retrouverons un jour
tous ensemble au service de notre cause commune, l’indépendance, la
singularité et la grandeur de la France, cet au revoir était superflu, n’est-ce
pas ? Cependant j’ai tenu à mettre les choses au point avec celle qui, par son
refus de tout partenariat avec notre petit mais vaillant parti, par son mépris
répété de notre dignité commune, de celle de chacun de nous, et de la mienne
propre, a créé une situation inextricable. Je vous prie de bien vouloir trouver
ci-joint le texte de la lettre que j’ai adressée à la présidente du Front
National, envoi ultime par lequel je demande à chacun de vous de rester fidèle
à la grande cause de l’unité des patriotes et vous dis à bientôt.
Lettre ouverte à Le Pen
Ce qui s'est passé samedi lors du Congrès
du SIEL m’a fait penser à vous, et simultanément à ce que l’on nomme dans nos
campagnes un « bull » – non pas un pitbull mais un bulldozer, qui
renverse tout et détruit tout.
Car voilà bien le point : pour vous,
quiconque n’est pas entièrement aligné devient un ennemi à éliminer par tous
les moyens. Parce que je ne suis pas entré au FN tout en vous soutenant lors la
présidentielle de 2012, préférant créer un parti politique qui, dans mon
esprit, pouvait devenir pour vous un partenaire et vous aider à dépasser un
Front dans lequel il me paraissait dangereux que vous vous enfermiez ; parce
que je prétendais être un allié mais point un rallié et qu’il me paraissait
normal à ce titre de développer des points de vue qui ne nous étaient pas
toujours communs (par exemple sur la politique économique, la Manif pour Tous
ou sur la cruciale question des alliances), vous avez tout à trac décrété le 7
avril que je n’étais plus président du SIEL, désignant aussitôt pour me
remplacer l’un de vos hommes liges. A bien y regarder, ce coup de tête était
incongru car on n’imagine pas, en France, que la présidente d’un parti désigne
celui d’un autre parti, fût-il son allié – et que, par exemple, le premier
secrétaire du PS nomme le président du PRG. Incongru mais aussi attentatoire à
la dignité, pour commencer la mienne propre, comme si je devais déguerpir sur
un claquement de doigts, mais aussi à la dignité de ce petit parti dont les
quelque 500 adhérents auraient mérité qu’on ne leur passe pas sur le corps, et
par-dessus le marché à la dignité de notre vie publique. Faire main basse sur
les partis deviendra-t-il une habitude ? Tout vous est peut-être promis,
Madame, mais tout ne vous est pas permis.
Pire : alors que vous m’aviez donné
votre parole de ne pas intervenir dans les affaires du SIEL, parole dont j’ai
vérifié en cette occasion qu’elle ne valait pas grand chose, vous avez
encouragé votre candidat à fouler aux pieds plusieurs articles des statuts du
SIEL, l’assurant de votre soutien lors d’un prétendu « congrès
extraordinaire » qui l’était en effet puisqu’il ne répondait à aucune des
conditions posées par nos statuts ; de même, vous l’avez laissé déposer en
préfecture, en catimini, un bureau entièrement à sa main comme si le bureau
régulier n’existait pas ; vous l’avez présenté comme président alors qu’il
n’avait été élu par aucune instance – ce que vous fîtes le 20 octobre à LCI et
Radio Classique, déclarant « je m’entends très bien avec M.
Ouchikh, président du SIEL », phrase ridicule puisqu’il n’était président que par votre
décret et que vous ne pouvez que bien vous entendre avec un quidam à votre
botte.
Un bulldozer ne s’arrête jamais. A
l’approche du congrès où j’avais annoncé que je ne demanderai pas le
renouvellement de mon mandat, toutes les intimidations furent bonnes. Oubliant
votre promesse de ne pas intervenir (promesse formulée par un SMS que j’ai en
archive) vous avez pris la tête d’un comité de soutien dans lequel tout
l’état-major de votre parti-bunker figurait au complet, de votre nièce Marion à
MM. Philippot, Aliot, Bay et j’en passe, jusqu’à faire vos fonds de tiroirs pour
embrigader Béatrice Bourges et mon ancien assistant parlementaire, lequel dut
envoyer un message de soutien à votre favori, un pistolet sur la tempe – comme
l’a dit l’un des participants effaré, il ne manquait plus que le Pape, le
Dalaï-Lama et la reine des Gitans. Passons sur les pressions ordinaires, quand
vos sbires laissent entendre à quiconque ne suivrait pas votre diktat que toute
carrière politique lui serait fermée, tandis qu’on promettait mille
investitures à ceux qui ployaient, votre directeur de cabinet allant jusqu’à
menacer toute rupture de relations avec l’un de nos candidats, M. Marsaud de
Labouygue, s’il ne se retirait pas –
j’ai aussi ce SMS dans mes archives. L’arme financière ne pouvait
manquer : alors que le financement public attaché aux 37 candidats que le
SIEL présenta aux Législatives de 2012 transite par le FN selon une convention
établie en due forme, vous retenez sans vergogne notre dû, n’en donnant qu’un
tiers par chèque expédié non au siège de notre parti mais à l’adresse
professionnelle de votre candidat – donnant entendre que, s’il n’était pas élu, ce serait l’asphyxie.
Rien ne vous retient jamais de tout
écraser : intimidant tout le monde, des dizaines de membres de votre parti
ont investi les lieux du congrès en exigeant de prendre la carte du SIEL afin
de participer au vote ; la plupart de ces « nouveaux membres »
ne savaient guère ce qu’était le SIEL, mais il fallait à tout prix faire des
voix pour soutenir votre candidat, réfuté par la majorité de nos membres. Dans
de telles conditions, aucune élection ne pouvait avoir lieu, serait-ce
seulement qu’il était impossible à notre huissier de déterminer le collège
électoral. Au milieu des invectives, j’ai préféré quitter la salle à peu près
sans mot dire sinon dénoncer le coup de force, me bornant à demander à mes amis
d’en faire autant, et faisant appel à la police du quartier pour protéger les
lieux, lesquels étaient placés sous ma responsabilité. Dans une telle
situation, les trois autres candidats se retirèrent, votre obligé étant élu par
99 % des votants.
Ainsi furent données aux yeux de tous
les preuves que j’attendais : d’abord, que les vieux démons ont la vie
dure, et que votre parti dont j’ai pu apercevoir au fil des derniers mois
quelques aspects peu ragoutants, est loin de mériter la dédiabolisation dont vous
vous targuez ; les « gros bras » qui ont fait irruption samedi,
hurlant et vociférant, multipliant fausses accusations, insultes et menaces
(notre secrétaire général fut physiquement menacé, s’entendant dire par deux
personnes, dont un de vos secrétaires départementaux, qu’on allait « lui
faire la peau ») rappellent les époques où s’illustra votre parti et que
l’on aurait aimé croire de bonne foi révolues ; ensuite, que vous
n’honorez ni votre signature, bien claire au bas de la convention qui nous lie
et que vous n’avez pas respectée, pas plus que votre parole ; enfin, que
vous n'avez et n’aurez jamais l’esprit de partenariat. Tout cela explique
l’absolue solitude du parti que vous dirigez d’une poigne de fer, et qui est
d’ailleurs coupé d’un grand nombre de personnalités et groupes dont il aurait
été dans votre mission de rassembler ; il explique que, le SIEL étant
mort, le prétendu « Rassemblement » Bleu Marine, réunion du FN et du
FN, et trois comparses, ne soit qu’une misérable coquille vide.
Votre attitude ou votre tempérament,
votre incapacité chronique à travailler avec quiconque n’est pas votre valet,
ruinent l’idée que vous puissiez jamais nouer quelque alliance que ce soit, ces
alliances que rendent pourtant nécessaires les institutions de la Ve République
et notamment l’élection présidentielle à deux tours ; elle démontre,
contrairement aux vaticinations de certains politiciens de votre entourage, une
incompatibilité plus foncière que je ne l’aurais pensé, entre l’héritage politique
du général de Gaulle et votre parti ; elle ruine enfin l’idée que vous
soyez un jour apte à gouverner la France, sauf à confondre votre parti et le
gouvernement. Ce n’est pas très grave pour vous car gouverner n’est pas votre
objectif, comme ce ne fut pas celui de votre père ou de votre famille en
général, qui a peut-être d’autres préoccupations ; c’est plus grave pour
des millions de Français dont vous captez et finalement détournez la colère
sans pour autant constituer une force qui puisse être dite gouvernementale –
vos électeurs étant de pauvres hères
hurlant à tue-tête mais ficelés sur leurs chaises, car c’est pour ainsi
dire leur neutralisation politique que votre égocentrisme partisan assure
perpétuellement. Seul gagnant de ce jeu infernal, outre vous-même et votre
gang : le Système que vous prétendiez pourfendre mais que votre stratégie
« ni droite ni gauche », vous plaçant
hors de toute perspective gouvernementale, met à l’abri de toute menace
populaire.
Parce qu’ils ne savent faire qu’une seule
chose, foncer et défoncer, les bulldozers s’abîment vite et je ne peux
m’empêcher de songer à votre sujet au Parti communiste qui, en 1945, avait
atteint près de 30 % de l’électorat et qui, après avoir égaré une bonne part de
notre peuple dans les chimères du sectarisme, a laissé son appareil gagner par
la rouille, comme les vieux bulls remisés dans les hangars de nos campagnes.
L’âme des peuples et les incarnations qu’elle se donne tour à tour fait
l’histoire, pas les machines, ni les partis. Tant mieux pour la France !
Paul-Marie Coûteaux
Très bien écrit, plein de ressentiment, on comprend parfaitement le point de vue sans le partager tout à fait, en vérité elle agit comme un maire qui en a marre des objections qui ralentissent le travail, et quand on a été conseiller municipal, on approuve même si c'est une technique de gouvernement bulldozer. La seule chose que vous ne possédez ni l'un ni l'autre c'est le sens du peuple, l'amitié pour les gens, l'empathie. C'est ça qui emportera l'adhésion demain. Attention aux Tapie et autres qui peuvent rafler une mise en dernier recours.
RépondreSupprimerLes partis ne sont qu'un moyen, non une fin. Marine Le Pen ne l'a pas compris, tant pis pour elle, la déconvenue n'en sera que plus dure. Merci, M. Couteaux, de conserver cette liberté conscience, qui honore l'esprit français.
RépondreSupprimerM. E. Tournemire
Marine serait-elle la Marie-George Buffet du FN ?
RépondreSupprimerEtant sympathisant du SIEL et du FN, j'ai été harcelé par l'état major du FN pour élire M. Ouchikh. Cette façon de vouloir presque m'imposer un vote m'a outré. Je suis déçu!
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